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6 janvier 2008

Gnose, Naissance du mythe - 1re partie

Le texte qui suit, déjà ancien, a pour source principale -quant à l'analyse symbolique-, l'oeuvre de Hans Jonas, remarquable introduction au sujet: "La religion gnostique"

Le premier chapitre, en deux parties, tente de replacer, à très gros traits, la gnose dans son contexte historique et culturel. Le deuxième chapitre, donné ici en quatre parties, aborde la question du mythe gnostique, à travers trois visions possibles de la gnose: comme mythe des origines (métaphysique) comme tentative d'explication du mal(révolte) ou comme première élaboration du récit visionnaire(mystique). Le troisième chapitre, en une partie, concluera sur l'imaginaire gnostique, et sur la structure naissante du mythe de la conscience poétique.


Chapitre I: Le monde éclaté de la fin de l'Antiquité



La Gnose apparaît au déclin de l’Antiquité. Les grandes armatures idéologiques des premiers millénaires, panthéons syncrétiques liées par des rites et des prêtres propres à chaque unité politique, voire sociale, d’Egypte, de Babylone et Sumer, d’Asie Mineure et d’ailleurs sont ébranlées par leur propre croissance, qui a provoqués un mouvement d’hommes, de marchandises, d’idées qui resserre le réseau jusqu’alors assez lâche des pouvoirs politiques et sociaux. Avant, culture, politique et économie étaient étroitement solidaires, même si cela n’allait pas sans effort ni tentations contraires. Peu à peu ces éléments constitutifs se délient, acquièrent une certaine autonomie. Et tandis que grandit la puissance militaire et administrative des Etats, le commerce se libère de sa tutelle sans laquelle il n’eut pu être, les prophètes apparaissent sur les places publiques; l’alphabet, la monnaie, bientôt le logos : tout se défait, circule et féconde.

 

De ces changements, la naissance de la Gnose est largement tributaire : les bouleversements sociaux et politiques, qui entraînent des déplacements volontaires ou non de peuples, et la naissance de couches sociales parcourant tout l’espace des empires : militaires, prêtres et administrateurs, artisans et artistes, favorisent les influences et les emprunts culturels et relâchent les liens entre les individus et les cultes localisés des Temples, provoquant l’apparition de nouveaux cultes aux origines diverses, au destin plus nomade. Ainsi, la Gnose porte la marque du monothéisme radical juif, du dualisme persan, de la philosophie spéculative grecque, des Mystères grecs et égyptiens, bien que sous une forme apparemment paradoxale, comme nous le verrons..

 

La diffusion grandissante de l’écriture et les changements liés à l’apparition de l’alphabet bouleverse aussi le paysage culturel en favorisant le passage à l’écrit de traditions et de modes de pensées plus populaires, plus libres du moins des attaches des temples, des classes intermédiaires citadines: soldats, marchands, artisans individuels, petits prêtres, etc., passage qui entraîne une modification de ces pensées. C’est peut-être ainsi que les traditions initiatiques et extatiques des peuples nomades, qui forment le noyau de certaines armées, et les traditions initiatiques de certains groupes sociaux, comme les métallurgistes peuvent avoir influencé la naissance de la Gnose dont les mythes semblent emprunter la structure des voyages extatiques et des initiations secrètes.

 

Ces bouleversements entamés vraisemblablement sous l’empire perse, se déploient durant l’époque hellénistique et les débuts de l’Empire romain. De nouvelles mythologies, de nouveaux cultes, de nouvelles pensées foisonnent, se succèdent, se concurrencent : c’est le temps des Mystères égyptiens et grec, de l’orphisme, de la philosophie grecque, de cultes orientaux axés sur l’un ou l’autre Dieu extrait des panthéons syncrétiques et se diffusant à travers les Empires, de l’éclatement du judaïsme en sectes concurrentes, comme l’essénisme.

 

Cette période s’achève peu à peu avec le triomphe de l’Empire romain. Aux grands ensembles locaux des mythologies suivi du foisonnement idéologique des derniers siècles avant notre ère, va succéder l’unité impériale. D’abord très superficielle, limitée au couvercle du culte de l’Empereur posé sur des idéologies locales et variées, elle se mue en une ambition universaliste, qui donne naissance aux religions dans le plein sens du terme. Certains éléments fondamentaux étaient déjà apparus dès le début de la nouvelle époque, avec le monothéisme croissant des cultes israélites et l’apparition progressive de la raison, du logos grec. Mais c’était là comme traits particuliers, capables d’influencer toutes les pensées alentours, non de les intégrer.

 

lCette évolution générale vers la religion universelle marque tous les courants de pensée, des cultes d’Isis et de Mithra, de la pensée grecque à travers le néoplatonisme, de l’Alliance juive, de la Gnoseelle-même à travers le mandéisme, Marcion, et le manichéisme, enfin de la religion chrétienne qui apparaît comme le produit achevé de cette évolution.

 

Isoler dans ce foisonnement parcouru d’emprunts et d’influences réciproques, un ensemble tel que la Gnose reste donc une tentative très approximative, sujette à bien des variations. La connaissance très parcellaire que nous en avons, après n’avoir connu d’elle que les citations et les portraits qu’en faisaient leur adversaires chrétiens devenus parfois a posteriori Pères de l’Eglise, rend incertaine et fluctuante la détermination de ses limites et la définition de ses éléments caractéristiques . Néanmoins, certains traits offrant entre eux une certaine cohérence, semblent avoir été partagés par quelques-uns des groupes inclus dans cet ensemble.

(2e partie)

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