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24 janvier 2008

Gnose, Naissance du mythe - 4e partie

Début du texte: ici

Les  mythes gnostiques divergent entre autres quant à l’origine supposée de ce principe du Mal, soit placé dès l’origine et ayant alors souvent le visage du « chaos » des conceptions grecques, soit étant comme un fils renégat du divin, trouvant donc son origine dans le divin même.

La plupart des textes, parce que nous n’en connaissons que des fragments, ou parce qu’il n’y a pas de systématique dans le traitement mythique de la Gnose, semblent ne pas décider quant à ce point. Le mal apparaît à un moment donné, comme s’il était le produit de la chute, mais d’une manière « naturelle », qui sous-entend qu’il a toujours été.

A signaler cependant que même dans le mythe radicalement dualiste du manichéisme, où le Mal est coéternel au Bien comme dans la tradition mazdéiste, il se transforme au cours du récit : Chaos à l’origine, et donc spontané, aléatoire, informel, il devient, par la rencontre et le combat avec l’Un, volontaire, formateur.

Au demeurant, certains témoignages semblent indiquer qu’il existait peut-être déjà chez Mani la conception que le Mal, la Matière, est à l’origine un ange créé par l’Un et déchu. Dans cette lutte entre l’envoyé de l’Un et la figure correspondante du Mal, le premier échoue inévitablement, car dans la Gnose le Bien est toujours dépeint comme plus faible, plus passif que le Mal. Cet échec entraîne une chute nouvelle, une descente supplémentaire dans les degrés de l’être, une nouvelle Création, où l’Ombre s’étend peu à peu sur la lumière originelle comme un piège se refermant sur sa proie, l’éloignant toujours plus de son origine, de la Totalité première, et instaurant le règne de la division.

Ainsi chaque création nouvelle porte à la fois la marque du Mal, et la marque du Divin, à la fois parce que la création a pour objet justement d’enfermer le divin en son sein, mais souvent aussi parce que l’envoyé de l’Un a voulu enclore dans la création le germe du divin par lequel se fera ultérieurement le salut.

Cette succession de Chutes, de créations mène au monde actuel  par une progression continue, de l’opacité à la lumière, de l’immatériel au matériel, de l’abstrait au concret, de l’informel à la figure, du spontané au volontaire, du tout au dispersé, de l’incréé au créé.

Ainsi le mythe gnostique apparaît comme une tentative d’explication de l’origine de l’ensemble des manifestations du monde créé, à partir d’une tension entre les contraires, comme un déploiement mythique de concepts philosophiques.

Au plus bas de la chute,  il y a l’homme et l’univers actuel, les créations les plus éloignées de l’unité primordiale, dominées par les principes du Mal, les désirs et les archontes, gardiens du cosmos au service du Mal. Les récits et chants gnostiques abondent en visions, noires et terribles, du monde actuel, et prononcent ainsi sa condamnation irrémissible.

Cependant, c’est aussi dans ce monde que va se produire le retournement du Destin, que la chute s’achève, et que va commencer le retour vers l’Un, la réintégration, le salut. Comme aux degrés précédents, l’univers et les êtres crées renferment, tous ou certains d’entre eux, une part du divin, porteuse d’un double visage qui parfois se présente séparément, comme prisonnier du Monde et comme germe secrètement enfoui en eux par l’Envoyé.

Mais le divin au cœur du monde créé, c’est aussi la dernière figure de l’Envoyé divin, errant à travers le monde,  lui-même enivré, endormi, perdu, enfermé, âme errante, sagesse aveugle, fils égaré. Le gnostique, d’abord, ignore ce germe qu’il porte, car l’ignorance est en lui la marque du Mal, qui l’a enivré, endormi, drogué. L’Un envoie à nouveau son messager, sa figure, qui apparaît à l’homme sous les traits de l’Etranger, l’Autre, marquant là encore que le vrai Dieu n’est en rien partie prenante du monde et du cosmos, qu’il est, définitivement et radicalement, l’Ailleurs. Eveillant le Gnostique de sa torpeur, celui-ci découvre qu’il est, lui aussi, un étranger définitif, exilé de sa vraie patrie, prisonnier.

Le sentiment du gnostique qui s’éveille est décliné dans les textes gnostiques sous toutes les variantes émotionnelles, depuis la béatitude face au spectacle de la perfection divine qui s’offre à ses yeux, jusqu’aux cris de douleurs et d’angoisse, par la prise de conscience de sa condition, en passant par  les reproches adressé à l’Un, à travers l’Envoyé, de l’avoir longtemps abandonné, ou par l’émotion pure de la rencontre. Il lui revient alors de se libérer de sa prison, de son déguisement, de son enveloppe trompeuse pour réintégrer son unité première. Se sauvant, il « sauve » l’Un, en effaçant la séparation née du premier drame originel .

Remontant vers le Père, il retrouve son unité, revêt son vêtement de lumière, rencontre son double divin, sa transparence immatérielle, sa vraie patrie. Il devient Dieu.

Il faut citer par ailleurs un autre type de récit gnostique, où le mythe se décline sous forme d’un récit de voyage. Elle est présentée dans L’hymne de la perle des "Actes de Thomas":
le fils du roi de l’Orient spirituel est envoyé vers l’Occident matériel, l’Egypte, à la recherche de la perle retenue au cœur du serpent du mal . Se revêtant d’abord des costumes des Egyptiens pour les tromper, il est drogué par eux et oublie ses origines. Son père lui envoie la « Lettre », qui lui parle, le réveille. Il entame alors le retour et, rencontrant au seuil de sa patrie son double, son vêtement de lumière, il s’en revêt.

(5e partie)

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