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14 mars 2009

Reprise/ Marxisme et surréalisme 1

J'avais annoncé la mi-mars au plus tard le réveil de ce blog, et nous y voici. Il est donc temps de reprendre, même si cela risque de rester encore un temps assez fluctuant.

Avec ce blog, deux autres, Envers, cahier d'art et de poésie, et Divergence, blog politique et historique, ont ou vont reprendre cours. Maintenir ces diverses activités écrites de front pose naturellement un problème de temps, partiellement levé pour quelques semaines, voire mois, mais répondent à une nécessité personnelle.

Je n'ai cessé depuis plus de 30 ans d'osciller entre réflexion politique et aventure poétique, souvent solitairement, parfois en compagnie, mais toute tentative de me consacrer à un seul de ces versants (plus souvent le poétique que le politique) fut toujours plus ou moins voué à l'échec. Le manque ressenti par l'absence du versant délaissé menait l'autre à l'échec.

Les mener de front au contraire fait que ce manque devient un moteur. La politique a un côté exaltant, mais aussi, ou justement pour cela, étouffant, provoquant des appels d'airs par où peut entrer le souffle poétique. La solitude des grands espaces de l'imaginaire fait ressentir le besoin de reprendre pied et structure dans la communauté, par où se bâtit une démarche politique. Signe de cela, c'est de se lancer dans l'écriture d'un blog politique qui m'a permis de trouver l'angle et surtout l'envie de reprendre ce blog consacré à l'imaginaire, dont le silence me désolait et me figeait.

La dualité de cette attente, j'ai tôt fait de la considérer comme fondamentale, et expression dans mes propres attentes d'un balancement plus fondamental propre à tous, même s'il ne prend que chez peu une telle forme. L'homme est un être tour à tour individuel et social, tel est le "lieu commun" d'où part cette exigence d'équilibre. Si j'ai été, et suis encore, attiré par la méthode marxiste et l'aventure surréaliste, c'est avec le sentiment, approfondi dans la réflexion, qu'ils incarnent actuellement l'une la nécessité sociale, l'autre la nécessité individuelle.

Pourtant, sur les formes qu'ils ont acquises, ils sont inconciliables: le marxisme, même en laissant de côté la caricature qu'en ont donné certains, dans le stalinisme, dans diverses formes d'ouvriérismes ou d'isolement sectaire, se développe sur une pensée déterministe qui fait de l'individu le produit du contexte social, conséquence d'une lecture simplifiée et trop rapide des œuvres de Marx et d'Engels, entre autres.

Quand bien même s'éloigne, sans toujours disparaître, la posture, d'origine stalinienne, mais qui a largement débordé de ce contexte initial, posture qui consiste à voir dans l'art et l'imaginaire la manifestation d'un haïssable "idéalisme et individualisme petit-bourgeois", selon ce merveilleux vocabulaire qui se donne des airs marxistes, mais est la négation même de la rigueur et de la dialectique marxiste, quand bien même l'intérêt pour l'art et l'imaginaire est souvent présent, voire parfois encouragé, dans les cercles et organisations marxistes, ce n'est jamais en y voyant l'expression d'une nécessité aussi fondamentale que celle qui les anime. Le terme d'individu y reste encore trop souvent suspect, même si on peut en comprendre la raison: l'action politique ne peut être que collective, et l'individualisme au sein de l'action sociale est un obstacle à la lutte, et même souvent le fruit de la pression idéologique de la société bourgeoise. Mais c'est là le reflet d'une tautologie: à problème social, réponse sociale; à problème individuel, réponse individuelle. Encore parle-t-on là de l'action politique et sociale, et non de la réflexion et de l'analyse, qui reste individuelles, qui doivent restées animées d'une grande liberté critique, d'une grande indépendance d'esprit, mais qui, menées rationnellement, ne sont rien d'autre que la socialisation de la pensée.

Marx et Engels n'ont pas élaboré une doctrine universelle. Ils ont appliqué une méthode d'analyse et de lutte aux problèmes spécifiques, sociaux et économiques, qui réclamaient leur attention et leurs efforts. A des degrés divers, leurs suiveurs ont eu tendance à considérer le marxisme comme un "tout", une interprétation plus ou moins définitive et globale de la condition humaine. Je ne voudrais pas céder à la facilité d'opposer Marx et marxistes: cette interprétation globalisante du marxisme est en puissance dans l'oeuvre de Marx comme d'Engels, et même parfois, je crois, énoncée chez ce dernier. Mais elle n'est ni la seule possible, ni nécessaire. Elle est même, au regard de la condition humaine, fausse.

Bien évidemment, l'être humain n'est pas divisé. Dire que l'homme est social et individuel n'empêche pas que dans les faits, on parle du même homme. Ses versants sociaux et individuels communiquent et se nourrissent l'un de l'autre, mieux: n'existent que l'un par l'autre.

N'y a-t-il alors moyen de les aborder d'un point de vue unique? N'est-il pas possible de les interpréter conjointement? Non. Parce que c'est justement dans l'interprétation, dans la pensée construite et dispensatrice de sens que se situe la divergence fondamentale de point de vue entre l'imaginaire, mode singularisant de la pensée, et la raison, mode socialisant.

Mais des approches, comme ces textes dont se compose ce blog, approches discursives, rationnelles, de l'imaginaire ne sont-elles pas la preuve du contraire? Oui et non. L'inexistence d'un point de vue unique n'empêche pas, et même exige un "dialogue" entre les deux modes, où la raison prend l'imaginaire pour objet, de même que l'imaginaire s'empare de l'objet rationnel pour l'ouvrir aux correspondances poétiques, à la dérive imaginaire. Approcher rationnellement l'imaginaire est contradictoire, mais c'est précisément cette contradiction qui fonde dans la pensée cette dualité de conscience.

Dire qu'il est en l'homme un versant social et un versant individuel, ce n'est pas dire qu'il s'agit là de deux parties séparées d'un tout, ni de deux faces d'une même pièce. Ce sont deux dynamiques contraires agissant sur cet ensemble complexe et ouvert qu'est la pensée, ensemble de faits en métamorphose constante et s'auto-organisant s'auto-organisant, comme tout système complexe ouvert. Ou si l'on préfère, deux polarités inverses de l'activité spirituelle. 

C'est sur ce point, inspiré de certains développements actuels de la science autour des problèmes de l'auto-organisation de la matière que les démarches de ce blog consacré à l'imaginaire, et celle de Divergence, surtout sur le plan historique, communiquent le plus clairement. Il en sera fait état dans une série d'articles en préparation, qui seront communs aux deux blogs, mais dont, au vu de la difficulté de leur construction je ne saurais prévoir d'échéance.

J'ai parlé du caractère inconciliable du marxisme et du surréalisme dans leurs formes prises, dans leur manifestation, mais je n'ai ici abordé que le marxisme. Il sera question prochainement du versant surréaliste.

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Commentaires
C
Tout étayage comme toute critique est bienvenue! Ravi de votre passage ici Fabrice. Je suis passé encore dans les riches pages de votre site Arcane 17, mais n'ai guère eu le temps d'y laisser de traces, la relance des blogs m'occupant trop pour l'heure. J'y reviendrai d'ici peu.<br /> <br /> Les positions politiques de Breton, et des surréalistes, n'ont cessé d'osciller entre apolitisme, marxisme et anarchisme, entre autres, aussi bien au cours des ans qu'entre les membres du groupe. Que l'on songe à des personnalités aussi essentielles que Péret et Mayoux, poète trop ignoré, l'un défendant le marxisme, l'autre l'anarchisme. <br /> Le vrai problème est peut-être moins leurs positions politiques que leurs positions vis-à-vis de la politique. Il en sera question dans la suite de cet article. Merci encore.
F
Pour étayer votre propos (si besoin est), dans le jeu "Ouvrez n'ouvrez pas" que vous connaissez vraisemblablement, à la question : "Marx frappe à votre porte. Vous ouvrez ou non ? Pourquoi" La réponse de Breton fut : "Non ! Par lassitude."<br /> C'était dans les années 50.
C
Espérons qu'il ne soit pas indigeste! <br /> Merci de ton passage, grosnuages
G
Je découvre ton blog et tes écrits gourmands..
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