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26 mars 2009

Surréalismes 10

La modernité du surréalisme

Il ne suffit pas au surréalisme de retrouver d’anciens pas. Sa nécessité repose autant sur sa capacité à incarner cette permanence de l’homme au cœur même de l’époque, d’en être là l’incarnation. Le signe focal de sa modernité est son athéisme radical.

Il ne s’agit pas là d’une vérité supérieure, illusion commune aux idéalismes rationalistes et religieux.  La vérité se mesure à la capacité d’intégrer le plus radicalement possible les faits, les connaissances, les désirs d’une époque et des précédentes. La connaissance scientifique comme les avancées de la pensée matérialiste ne contredisent pas l’idée de Dieu, c’est l’idée de Dieu qui n’est plus intelligible que dans l’aveuglement d’une majeure partie de la conscience moderne.

L’athéisme est quant à lui capable d’intégrer des faits modernes et anciens. Mais il ne réside pas dans la seule proclamation, non plus que dans l’invective. Il est un travail d’intégration, de métamorphoses des pensées anciennes.

Ainsi l’idée de quête gnostique telle qu’elle s’épanouira dans certaine mystique musulmane des XIIe – XIIIe siècle n’est pas transposable dans le surréalisme simplement en le décapitant de l’encombrant fantôme. Ainsi, la quête mystique n’a pas à remplacer l’Aimé mystique par l’être aimé, l’effusion en Dieu par l’effusion charnelle (d’autant que  ce déplacement est proche d’être réalisé dans certains mysticismes). Libérée de Dieu, la quête perd toute linéarité et toute finalité. Elle tend à devenir une aventure composée de faits ayant les caractères des épisodes de la quête, mais qui résistent, et qui ne visent pas au salut en l’Un, mais à la rencontre de soi par la résonance sans cesse renaissante entre les visages multiples du réel.

L’athéisme dans le surréalisme est une ambition, non un fait. Ce n’est pas propre au surréalisme. C’est l’ensemble de la pensée humaine encore engluée dans les lambeaux entêtant des siècles de monothéisme, qui doit être repensé à la lumière de ce basculement. L’athéisme n’est pas une conviction, mais un travail à effectuer. Ce qui signifie aussi que les pensées anciennes, loin d’être condamnées dans l’enfer de l’erreur, gardent pour toute connaissance la valeur mise en elles par ceux qui les ont édifiées., au prix d’un déplacement fondateur.

(à suivre)

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Commentaires
P
Et bien pour être honnête, je ne sais pas non plus vraiment où tout cela peut bien aboutir.<br /> Cela me fait penser aux papiers papillon, concept qui me ressemble un peu. <br /> Mon côté "fleur de peau" que tu connais si bien incite à la dérive du sujet profond pour parcourir un mot, une phrase qui interpelle (en l'occurence le mot "athéisme" repris 4 fois dans le texte). Il ne m'en faudra pas plus pour avoir lancé mon 1er commentaire-avec des erreurs sur la phrase d'accord:)-et à Charp d'y avoir répondu.<br /> Je ne prétends pas et n'ai jamais prétendu être une spécialiste du Surréalisme ni de la surréalité. Juste une "fleur de peau" qui aime jouer avec les résonnances:)<br /> Bisous
F
À mon avis, je pense que la surréalité est ce lieu de résolution, de sublimation. Quant à l'approche de l'en-deça et de l'au-delà, j'avoue avoir du mal à vous suivre,je ne vois pas très bien où vous voulez en venir, mais…
C
Je dois bien dire que Daumal, et les auteurs du Grand Jeu en général constitue l'un de mes manques. Il y en a tant que je ne sais si j'aurai l'occasion de le combler. J'essaierai.<br /> Tu parles d'un rapprochement de l'au-delà et l'en-deçà. Mais Breton lui-même ci-dessus souligne que l'au-delà n'est que l'en-deçà projeté au-dehors par l'espoir humain. Il n'ont donc pas à être "conciliés".<br /> S'il est un point sublime où cessent les contradictions, il est à rechercher, entre autres, dans la contradiction entre l'en-deçà/au-delà et le réel. C'est là à mon sens l'ambition surréaliste, et ce à quoi appelle le "pratiquer la poésie" de Breton.<br /> J'avais écrit une réponse plus longue encore, mais je m'aperçois qu'elle ouvre sur quelque chose d'essentiel pour moi, et concerne l'orientation même données aux "recherches" ici abordées. J'en ferai donc très prochainement un article séparé. <br /> C'est la vertu des dialogues que d'engendrer pus de clarté.<br /> <br /> Merci donc de ton intervention, Pascale.
P
Il s'agit bien là du rapprochement des antinomies pour tendre vers le "point sublime".<br /> La difficulté étant de trouver ce point qui ne se situe ni dans les au-delà ni dans les en-deçà mais dans le rapprochement des deux. Et je pense que c'est bien dans cette quête que l'on s'éloigne de toute comparaison avec les quêtes religieuses. L'athéisme ne reniant pas la puissance de la mémoire collective, je ne crois pas qu'il puisse n'être qu'ambition mais bien un fait.Il faut que l'on puisse différencier Mythologie et Mysticisme.<br /> A mes yeux René Daumal y est extèmement bien arrivé dans "Le Mont Analogue", travail sublime même s'il ne l'a pas finalisé.
C
L'au-delà, dans notre contexte culturel, renvoie à l'idée de Dieu, et sur ce point, Breton a toujours été ferme.<br /> Au sortir de l'époque où il s'affirme le plus nettement proche des pensées traditionnelles, il n'en écrit pas moins, après s'être opposé au rejet, par la plupart des courants ésotériques, de l'amour charnel, qu'"il fallait s'attendre à ce que le désir sexuel [...] s'avérât en dernière analyse, l'égarant, le vertigineux et inappréciable "en-deçà" sur la prolongation sans limites duquel le rêve humain a bâti tous les "au-delà"."<br /> On pourrait, mais le contexte culturel susdit doit nous rendre prudent, évoquer un sentiment de "l'au-delà" dans cette vie, sentiment de l'inaccessible, et de l'espoir que l'on peut y placer, le rôle donné à cet inaccessible comme polarité de la vie signalant non un but, mais l'attraction qu'il peut imprimer sur certaines destinées.
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