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21 mars 2009

Gnose, naissance du mythe - 6

3e version :  Le voyage de retour

Le mythe gnostique est symétrique : l’Ascension vers le salut remonte la trajectoire de la chute. Ces deux mouvements symétriques sont doublés par l’intervention du sauveur, du Messager, qui lui aussi descend et remonte, qui descend pour appeler à remonter. Si l’on met l’accent sur le mode spéculatif, on aura tendance à voir l’original dans la Chute et inversement si l’on met l’accent sur le mode visionnaire.
Nous avons raconté le mythe gnostique du « point de vue » de la Chute, puis d’une certaine manière, du point de vue du Mal. Revoyons-le, racontons-le à présent, le même, mais au départ de l’Ascension, du salut. Ou plutôt, à la vision universelle, métaphysique, et à la vision descriptive, succède maintenant la vision individuelle.

L’Appel retentit. Le gnostique s’éveille. Il voit le Messager et apprend ou comprend qu’il est descendu jusqu’à lui, qu’il a traversé les cercles du monde pour venir l’éveiller. Il se voit, lui le gnostique, prisonnier du monde, endormi, drogué. Il se souvient à présent de sa vraie patrie et prend conscience de sa situation de prisonnier, d’exilé, d’isolé. Il ressent de l’angoisse, de la douleur, si la conscience de sa situation prédomine, de la joie ou de la nostalgie si c’est le souvenir qui prend le dessus. Les « Pourquoi, comment ? » sont pour lui des cris de douleur : la chute est une ascension nostalgique.

Il prend conscience qu’il est radicalement étranger au monde, qu’il vient d’ailleurs, qu’il est autre ou divisé. Il doit se libérer, se dévêtir de sa condition. Il doit abandonner tout ce qui le relie au monde, tout ce qui le situe en ce lieu. Cet abandon se confond ou précède l’ascension, le retour. Il  traverse les cieux, au besoin trompe les gardiens ou les vainc par la connaissance des vrais noms. Il revient alors chez lui, dans l’Unité primordiale. Là, raconte l’Hymne de la perle, il rencontre son « double » son vêtement de lumière qu’il revêt, et réintègre son Moi originel.

On constate, à ce récit, que l’immédiateté du salut, proclamée par les gnostiques, critiquées par ses adversaires, n’est pas si évidente. L’Eveil est déjà le salut., mais l’affirmation du salut comme potentialité ne demandant qu’à se déployer, et le voyage de retour n’est que ce déploiement possible, l’Eveil étant lui-même le déploiement du possible endormi au cœur de l’homme, la marque au front.

L’instant premier, dans cette version, l’Eveil, qui est au centre du mythe, contient en germe toute la quête : il est Appel (et entendre L’Appel, c’est déjà remonter), retour (par la nostalgie qui ramène l’esprit dans le sein originel), abandon du monde par l’ouverture du sens, sentiment immédiat de la séparation et angoisse d’emprisonnement. Il est aussi, déjà, annonçant la rencontre du double au seuil de l’Unité, rencontre de l’image divine du Soi, ici l’Envoyé, l’Etranger, et est donc par là même déjà réintégration.

Vient ensuite le cri, la tristesse, ou la joie des retrouvailles. La nostalgie au fond n’est-elle pas en fait nostalgie de l’instant premier, de l’Eveil ? Les cris, signe qu’à l’éveil de l’esprit répond l’éveil de la douleur, après l’anesthésie. L’angoisse, la révolte, le sentiment d’étrangeté : comme la prise de conscience de l’individualité.

Quant à l’abandon, à la fois comme retour à la Mère, à l’Un, donc comme négation de l’individu séparé, mais aussi comme affirmation de l’individualité par rapport au monde qui l’entoure, avec l’objet, et donc déploiement de cette individualité. Comme si la Gnose ressentait que la seule possibilité du déploiement de l’individu passait par sa négation.

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